Captives
Captives, le dernier film d’Arnaud des Pallières, plonge dans un pan sombre et fascinant de l’histoire française : celui des internements féminins à la Salpêtrière à la fin du XIXe siècle. Sur le papier, le projet avait tout pour séduire : un casting intéressant, une reconstitution d’époque ambitieuse et des thématiques puissantes comme l’injustice sociale, les violences médicales et la condition féminine. Pourtant, si l’intention est louable, l’exécution s’avère plus chaotique qu’émouvante.
L’intrigue suit Fanni, une jeune bourgeoise incarnée par Mélanie Thierry, qui choisit de se faire interner volontairement dans l’asile pour retrouver sa mère disparue. À travers son regard, le spectateur découvre la réalité des « folles », ces femmes enfermées pour des raisons arbitraires : pauvreté, rébellion, ou simple différence. Tandis que le dernier bal annuel de la Salpêtrière se prépare, Fanni navigue entre l’espoir de réponses et la violence d’un univers oppressant.
Le scénario repose sur une structure narrative classique : une étrangère découvre un microcosme clos, y subit une transformation personnelle, et tente d’y laisser sa marque. Si cette trame assure une certaine accessibilité, elle manque cruellement de profondeur. Les enjeux sont posés dès le départ, mais le film peine à les développer. Fanni, bien qu’au centre du récit, est un personnage fonctionnel, plus guide pour le spectateur qu’héroïne véritablement transformée. Certains personnages secondaires, comme Camomille (Yolande Moreau) et Bobotte (Josiane Balasko), intriguent par leur potentiel narratif, mais restent cantonnés à des esquisses. C’est frustrant, car ces figures portaient en elles des fragments essentiels de l’époque et de ses injustices.
Sur le plan thématique, le film s’attaque à des sujets vastes et complexes, mais échoue à les explorer avec nuance. La condition féminine et la médicalisation de la folie sont abordées de façon parfois trop didactique, avec des dialogues qui expliquent lourdement ce que les images auraient pu transmettre avec plus de subtilité. Les séquences consacrées au bal, par exemple, auraient pu être l’occasion d’un moment de catharsis ou de dénonciation viscérale, mais elles manquent de souffle, se perdant dans une esthétique soignée mais peu immersive.
Visuellement, le film est une curiosité. Loin des teintes grises et froides qu’on associe généralement aux films carcéraux, Des Pallières opte pour des couleurs éclatantes et saturées, inspirées des autochromes de la fin du XIXe siècle. Cette approche contraste de manière intéressante avec la dureté du sujet, mais elle peut aussi brouiller l’impact émotionnel de certaines scènes. La lumière naturelle, exacerbée par une canicule pendant le tournage, donne un cachet inattendu à l’asile, mais parfois au détriment de l’atmosphère oppressante qu’on aurait pu attendre.
La réalisation, en revanche, est le point faible du film. David Chizallet, à la caméra, semble hésiter entre intimisme et grandiloquence, multipliant les zooms et les gros plans qui diluent l’intensité de certaines scènes clés. Ce choix stylistique, maladroit, détourne parfois l’attention des personnages et de leurs histoires, donnant au film une impression d’artificialité.
Le casting, pourtant impressionnant sur le papier, livre des performances inégales. Mélanie Thierry, bien que lumineuse et investie, semble écrasée par un rôle qui ne lui laisse pas assez d’espace pour briller. À l’inverse, Josiane Balasko et Yolande Moreau réussissent à injecter de l’humanité et de la profondeur dans leurs personnages, malgré leur temps d’écran limité. Lucie Zhang apporte une fraîcheur bienvenue, mais d’autres actrices, comme Carole Bouquet, peinent à sortir des stéréotypes imposés par le scénario.
En somme, Captives est une œuvre ambitieuse mais déséquilibrée. Si le film intrigue par son sujet et son esthétique, il échoue à atteindre son plein potentiel narratif et émotionnel. Les amateurs de drames historiques y trouveront sans doute de quoi nourrir leur curiosité, mais les failles de l’écriture et de la mise en scène rendent l’expérience frustrante. Un film à voir pour son sujet, mais sans en attendre une immersion totale ou un traitement inoubliable.
Note : 5 / 10
L’intrigue suit Fanni, une jeune bourgeoise incarnée par Mélanie Thierry, qui choisit de se faire interner volontairement dans l’asile pour retrouver sa mère disparue. À travers son regard, le spectateur découvre la réalité des « folles », ces femmes enfermées pour des raisons arbitraires : pauvreté, rébellion, ou simple différence. Tandis que le dernier bal annuel de la Salpêtrière se prépare, Fanni navigue entre l’espoir de réponses et la violence d’un univers oppressant.
Le scénario repose sur une structure narrative classique : une étrangère découvre un microcosme clos, y subit une transformation personnelle, et tente d’y laisser sa marque. Si cette trame assure une certaine accessibilité, elle manque cruellement de profondeur. Les enjeux sont posés dès le départ, mais le film peine à les développer. Fanni, bien qu’au centre du récit, est un personnage fonctionnel, plus guide pour le spectateur qu’héroïne véritablement transformée. Certains personnages secondaires, comme Camomille (Yolande Moreau) et Bobotte (Josiane Balasko), intriguent par leur potentiel narratif, mais restent cantonnés à des esquisses. C’est frustrant, car ces figures portaient en elles des fragments essentiels de l’époque et de ses injustices.
Sur le plan thématique, le film s’attaque à des sujets vastes et complexes, mais échoue à les explorer avec nuance. La condition féminine et la médicalisation de la folie sont abordées de façon parfois trop didactique, avec des dialogues qui expliquent lourdement ce que les images auraient pu transmettre avec plus de subtilité. Les séquences consacrées au bal, par exemple, auraient pu être l’occasion d’un moment de catharsis ou de dénonciation viscérale, mais elles manquent de souffle, se perdant dans une esthétique soignée mais peu immersive.
Visuellement, le film est une curiosité. Loin des teintes grises et froides qu’on associe généralement aux films carcéraux, Des Pallières opte pour des couleurs éclatantes et saturées, inspirées des autochromes de la fin du XIXe siècle. Cette approche contraste de manière intéressante avec la dureté du sujet, mais elle peut aussi brouiller l’impact émotionnel de certaines scènes. La lumière naturelle, exacerbée par une canicule pendant le tournage, donne un cachet inattendu à l’asile, mais parfois au détriment de l’atmosphère oppressante qu’on aurait pu attendre.
La réalisation, en revanche, est le point faible du film. David Chizallet, à la caméra, semble hésiter entre intimisme et grandiloquence, multipliant les zooms et les gros plans qui diluent l’intensité de certaines scènes clés. Ce choix stylistique, maladroit, détourne parfois l’attention des personnages et de leurs histoires, donnant au film une impression d’artificialité.
Le casting, pourtant impressionnant sur le papier, livre des performances inégales. Mélanie Thierry, bien que lumineuse et investie, semble écrasée par un rôle qui ne lui laisse pas assez d’espace pour briller. À l’inverse, Josiane Balasko et Yolande Moreau réussissent à injecter de l’humanité et de la profondeur dans leurs personnages, malgré leur temps d’écran limité. Lucie Zhang apporte une fraîcheur bienvenue, mais d’autres actrices, comme Carole Bouquet, peinent à sortir des stéréotypes imposés par le scénario.
En somme, Captives est une œuvre ambitieuse mais déséquilibrée. Si le film intrigue par son sujet et son esthétique, il échoue à atteindre son plein potentiel narratif et émotionnel. Les amateurs de drames historiques y trouveront sans doute de quoi nourrir leur curiosité, mais les failles de l’écriture et de la mise en scène rendent l’expérience frustrante. Un film à voir pour son sujet, mais sans en attendre une immersion totale ou un traitement inoubliable.
Note : 5 / 10
Vu le 1 juillet 2024