• Julien   Lepage

Shotaro Ishinomori, disciple du célèbre Osamu Tezuka, est un auteur de bande dessinée prolifique et polyvalent. Avec environ 770 histoires à son actif, il a exploré tous les genres imaginables, des biographies d'artistes aux récits financiers, en passant par la science-fiction et les aventures de super-héros. Parmi ses œuvres disponibles en français, on peut citer "Hokusai", "Le Voyage de Ryu", "Sabu et Ichi", "Cyborg 009" et "Les Secrets de l'économie japonaise". Avec "Eros X SF", Le Lézard noir nous présente la production érotique de ce maître du manga. "Eros X SF" est un recueil de 15 nouvelles publiées entre 1968 et 1975, mêlant habilement érotisme et science-fiction. Les personnages principaux sont des jeunes adultes en proie à une misère sexuelle, reflet d'une passivité maladive et d'une angoisse face à l'avenir. Dans ces histoires, un coup de pouce venu d'ailleurs, souvent sous la forme d'une technologie ou d'un être extraterrestre, est le seul moyen pour ces personnages d'accéder à l'amour et à la sexualité. Cependant, malgré son potentiel intrigant, "Eros X SF" peine à convaincre pleinement. Les premières histoires, bien que drôles et originales, sont desservies par une science-fiction désuète et des ficelles narratives un peu pénibles à la longue. La seconde moitié du recueil, plus mûre et mélancolique, se démarque par son rapport à la sexualité plus grave et terre-à-terre, ainsi que par ses idées graphiques plus abouties. On y trouve des perles comme "Rouge lointain", une histoire marquante sur les traumatismes liés à la sexualité, ou encore "Utamaro", une ode élégante au mélange des fluides et des styles graphiques. Cependant, le recueil souffre d'une certaine inégalité dans la qualité de ses histoires. Certaines sont fascinantes et posent des questions intéressantes sur la place du sexe dans la vie, tandis que d'autres sont plus anecdotiques et moins captivantes. De plus, le style graphique, bien que remarquable, est parfois un peu daté et peut ne pas plaire à tous les lecteurs. En conclusion, "Eros X SF" est un recueil intéressant, mais inégal. Il offre un aperçu fascinant de la production érotique de Shotaro Ishinomori et de la société japonaise des années 1960 et 1970, mais peine à convaincre pleinement en raison de ses histoires inégales et de son style graphique parfois daté. Les amateurs de science-fiction érotique et de manga vintage y trouveront certainement leur compte, mais les autres pourraient être un peu déçus. Pour ceux qui apprécient le style d'Ishinomori, je recommanderais plutôt "Cyborg 009", une de ses œuvres les plus célèbres, qui allie avec brio science-fiction et aventures de super-héros. Pour ceux qui s'intéressent à l'érotisme dans le manga, "L'École emportée" de Kazuo Umezu ou "La Cantine de minuit" de Yaro Abe pourraient être des choix intéressants.

Note : 6 / 10