Manon des sources
Voilà un film qui sent bon la lavande et le mistral. Claude Berri nous revient en 1986 avec la suite de son adaptation de Marcel Pagnol, et cette fois-ci, c'est Emmanuelle Béart qui vole la vedette à Yves Montand et Daniel Auteuil. Autant vous dire que l'attente était à la hauteur des cigales en plein été provençal.
L'histoire reprend dix ans après les événements de Jean de Florette. Manon, la fille du défunt bossu, est devenue une belle jeune femme vivant en ermite dans les collines. Pendant ce temps, Ugolin et le Papet prospèrent grâce à leur source « miraculeuse ». Mais quand Manon découvre la vérité sur la mort de son père, elle décide de se venger en coupant l'eau du village. S'ensuit un drame à la hauteur des meilleures tragédies grecques, avec des révélations qui feront trembler jusqu'aux oliviers.
Le scénario de Berri, fidèle à Pagnol, est un mélange habile de vengeance, d'amour impossible et de secrets de famille. C'est du lourd, comme dirait un Marseillais. La force du récit réside dans sa capacité à transformer les « méchants » du premier volet en personnages complexes et parfois même touchants. Cependant, on peut regretter quelques longueurs, notamment dans les scènes de village qui, bien que pittoresques, ralentissent parfois le rythme.
Les personnages gagnent en profondeur dans ce second opus. Manon n'est plus la petite fille innocente, mais une femme déterminée, presque sauvage. Ugolin, toujours aussi simple d'esprit, devient paradoxalement le personnage le plus tragique, déchiré entre son amour pour Manon et sa loyauté envers le Papet. Quant au vieux César, il voit son monde s'écrouler avec une ironie du sort digne d'un Sophocle.
Le film aborde des thèmes universels comme la vengeance, la culpabilité et les conséquences de nos actes, mais c'est surtout une réflexion sur la nature humaine et sur la façon dont les secrets peuvent empoisonner des générations entières. Berri réussit à ancrer ces questions dans le terroir provençal, montrant comment la terre et l'eau peuvent être à la fois source de vie et de conflit.
Côté réalisation, Berri nous offre à nouveau des images somptueuses de la Provence. Les collines dorées, les champs de lavande, les villages perchés… c'est à se demander si l'office du tourisme n'a pas mis la main au porte-monnaie. La musique de Jean-Claude Petit souligne habilement les moments dramatiques sans tomber dans le mélo. Cependant, on peut parfois avoir l'impression que Berri s'attarde un peu trop sur ces beaux paysages, au détriment du rythme narratif.
Les performances des acteurs sont globalement convaincantes. Béart, qui a même fait un stage chez un chevrier pour préparer son rôle, apporte une fraîcheur et une intensité bienvenues. Auteuil, qui a dû retrouver l'accent qu'il s'était efforcé de perdre à Paris, est particulièrement touchant dans son rôle d'Ugolin amoureux transi. Montand, qui avait initialement refusé le rôle par coquetterie, finit par donner une performance nuancée en Papet rattrapé par son passé.
En fin de compte, Manon des Sources a du caractère, mais il faut savoir l'apprécier lentement. Le film conclut de manière satisfaisante le diptyque de Berri, offrant une fresque provençale à la fois belle et tragique. Cependant, il pèche parfois par un rythme un peu lent et une tendance à s'appesantir sur le pittoresque. Pour les amateurs de Pagnol et de drames ruraux, c'est un incontournable. Pour les autres, c'est une belle fenêtre sur un monde disparu, mais qui demande un peu de patience. À voir en double séance avec Jean de Florette, de préférence avec un verre de rosé bien frais.
Note : 7 / 10
L'histoire reprend dix ans après les événements de Jean de Florette. Manon, la fille du défunt bossu, est devenue une belle jeune femme vivant en ermite dans les collines. Pendant ce temps, Ugolin et le Papet prospèrent grâce à leur source « miraculeuse ». Mais quand Manon découvre la vérité sur la mort de son père, elle décide de se venger en coupant l'eau du village. S'ensuit un drame à la hauteur des meilleures tragédies grecques, avec des révélations qui feront trembler jusqu'aux oliviers.
Le scénario de Berri, fidèle à Pagnol, est un mélange habile de vengeance, d'amour impossible et de secrets de famille. C'est du lourd, comme dirait un Marseillais. La force du récit réside dans sa capacité à transformer les « méchants » du premier volet en personnages complexes et parfois même touchants. Cependant, on peut regretter quelques longueurs, notamment dans les scènes de village qui, bien que pittoresques, ralentissent parfois le rythme.
Les personnages gagnent en profondeur dans ce second opus. Manon n'est plus la petite fille innocente, mais une femme déterminée, presque sauvage. Ugolin, toujours aussi simple d'esprit, devient paradoxalement le personnage le plus tragique, déchiré entre son amour pour Manon et sa loyauté envers le Papet. Quant au vieux César, il voit son monde s'écrouler avec une ironie du sort digne d'un Sophocle.
Le film aborde des thèmes universels comme la vengeance, la culpabilité et les conséquences de nos actes, mais c'est surtout une réflexion sur la nature humaine et sur la façon dont les secrets peuvent empoisonner des générations entières. Berri réussit à ancrer ces questions dans le terroir provençal, montrant comment la terre et l'eau peuvent être à la fois source de vie et de conflit.
Côté réalisation, Berri nous offre à nouveau des images somptueuses de la Provence. Les collines dorées, les champs de lavande, les villages perchés… c'est à se demander si l'office du tourisme n'a pas mis la main au porte-monnaie. La musique de Jean-Claude Petit souligne habilement les moments dramatiques sans tomber dans le mélo. Cependant, on peut parfois avoir l'impression que Berri s'attarde un peu trop sur ces beaux paysages, au détriment du rythme narratif.
Les performances des acteurs sont globalement convaincantes. Béart, qui a même fait un stage chez un chevrier pour préparer son rôle, apporte une fraîcheur et une intensité bienvenues. Auteuil, qui a dû retrouver l'accent qu'il s'était efforcé de perdre à Paris, est particulièrement touchant dans son rôle d'Ugolin amoureux transi. Montand, qui avait initialement refusé le rôle par coquetterie, finit par donner une performance nuancée en Papet rattrapé par son passé.
En fin de compte, Manon des Sources a du caractère, mais il faut savoir l'apprécier lentement. Le film conclut de manière satisfaisante le diptyque de Berri, offrant une fresque provençale à la fois belle et tragique. Cependant, il pèche parfois par un rythme un peu lent et une tendance à s'appesantir sur le pittoresque. Pour les amateurs de Pagnol et de drames ruraux, c'est un incontournable. Pour les autres, c'est une belle fenêtre sur un monde disparu, mais qui demande un peu de patience. À voir en double séance avec Jean de Florette, de préférence avec un verre de rosé bien frais.
Note : 7 / 10
Vu le 30 mars 2013