• Julien   Lepage

Mary, réalisé par Marc Webb, nous plonge dans la vie d'une petite fille surdouée, Mary (Mckenna Grace), élevée par son oncle Franck (Chris Evans), un homme un peu paumé qui vit de petits boulots en Floride.

L’histoire débute comme une réflexion prometteuse sur l’éducation d’un enfant surdoué. Mary, qui résout des équations complexes à huit ans, fait l’objet d’un combat entre son oncle, qui veut préserver sa simplicité enfantine, et sa grand-mère, incarnée par Lindsay Duncan, qui souhaite l’envoyer dans une école spécialisée pour exploiter son potentiel au maximum. En parallèle, une institutrice bienveillante (Jenny Slate) se rapproche de Franck, donnant naissance à une relation intime entre ces deux personnages. Ce schéma n’est pas sans rappeler le trio enfant surdoué/adulte paumé/prof que l’on retrouve dans Un monde meilleur, mais cette fois-ci sans la même finesse.

Là où Mary peine à convaincre, c'est dans la gestion de ce trio. Franck, l’oncle un peu à la dérive, semble ne pas avoir de réelle profondeur. Ses motivations sont claires — offrir une enfance « normale » à Mary — , mais son personnage reste relativement figé. Il est censé incarner une figure protectrice, mais les dilemmes auxquels il est confronté manquent de complexité. On aurait pu espérer que la relation naissante avec l'institutrice enrichisse son développement, mais cette intrigue secondaire ne va nulle part et tombe à plat, en particulier face à des enjeux bien plus grands, comme l’avenir de Mary.

Comparé à Un monde meilleur, où chaque personnage avait un rôle crucial à jouer dans le dénouement émotionnel, Mary semble souffrir d’un déséquilibre. Le lien entre l’enfant et l’adulte est certes touchant, et Mckenna Grace est véritablement la force motrice du film, mais la dynamique entre les trois protagonistes n’est pas exploitée avec suffisamment de subtilité. Franck et l’institutrice, censés former un duo complémentaire, n’arrivent pas à offrir la même profondeur que les personnages de Kevin Spacey et Helen Hunt dans le film de Leder.

Sur le plan scénaristique, Mary s’éparpille également. La méthode de calcul mental que Mary explique, la fameuse méthode Trachtenberg, est incorrectement utilisée, et le problème de Navier-Stokes, bien que central dans le récit, est à peine développé. Le manque de vulgarisation laisse les non-initiés à l’écart, ce qui est dommage pour un film qui aurait pu se distinguer en mettant en avant l’aspect mathématique de manière plus accessible. Cet élément, qui est le fil rouge du film, finit par devenir un simple prétexte, éclipsé par des scènes de tribunal peu inspirées.

Le film reste agréable grâce à des moments de comédie pure et une bande-son sympathique, mais il est difficile de passer outre l’impression d’un gâchis. Les scènes qui devraient être chargées d’émotion tombent souvent à plat, et les retournements de situation manquent de crédibilité. On aurait préféré un film plus concentré sur les relations humaines, sans les détours inutiles d’un procès qui n’apporte finalement pas grand-chose.

En conclusion, Mary n’arrive pas à se démarquer malgré des éléments prometteurs. C'est un film sympathique, avec de beaux moments, mais ses incohérences et son manque d’audace en font une œuvre oubliable.

Note : 6 / 10