Les valseuses
En 1974, Bertrand Blier balance une grenade dégoupillée dans le cinéma français bien-pensant avec Les valseuses. Ce road-movie déjanté, mettant en scène deux jeunes loubards en cavale incarnés par Gérard Depardieu et Patrick Dewaere, a fait l'effet d'une bombe à l'époque. Près de 50 ans plus tard, que reste-t-il de ce film culte qui a fait scandale et révélé au grand public deux monstres sacrés du cinéma hexagonal ?
L'histoire suit Jean-Claude et Pierrot, deux petites frappes de banlieue qui passent leur temps à emmerder le monde et à chercher leur prochain coup. Lors d'une de leurs frasques, ils embarquent Marie-Ange (Miou-Miou), une jeune femme au grand cœur mais frigide. S'ensuit une virée à travers la France, ponctuée de rencontres improbables, de moments de tendresse inattendue et de provocations en tous genres.
Le scénario, adapté du roman éponyme de Blier, ne brille pas par sa complexité. C'est davantage une succession de tableaux qu'une narration linéaire. Mais c'est justement là que réside sa force : dans cette liberté de ton et de structure qui colle parfaitement à l'esprit libertaire du film. Blier ose tout, bousculant les conventions avec un malin plaisir. Il y a certes des longueurs et des scènes qui peuvent sembler gratuites, mais l'ensemble reste étonnamment cohérent dans son incohérence même.
Les personnages sont hauts en couleur et complexes malgré leur apparente simplicité. Jean-Claude et Pierrot sont de véritables sales gosses, tour à tour attachants et détestables. Leur amitié indéfectible est le véritable moteur du film. Marie-Ange, quant à elle, n'est pas qu'un simple objet sexuel : son évolution au fil du récit en fait un personnage à part entière. Les personnages secondaires, comme la touchante Jeanne Moreau, apportent une profondeur inattendue à ce qui aurait pu n'être qu'une comédie potache.
Les valseuses aborde des thèmes qui, s'ils ne sont plus aussi choquants aujourd'hui, restent pertinents : la liberté sexuelle, la révolte contre l'ordre établi, la quête du plaisir comme acte politique. Le film capture parfaitement l'esprit post-68, ce mélange de désillusion et de fureur de vivre. C'est un portrait sans concession d'une jeunesse en roue libre, qui refuse les conventions d'une société qu'elle juge hypocrite.
Techniquement, le film a plutôt bien vieilli. La mise en scène de Blier, sans être révolutionnaire, est efficace et parfois même inspirée. Je pense notamment à cette scène de poursuite filmée en travelling arrière, qui capture toute l'énergie brute des personnages. La photographie de Bruno Nuytten est magnifique, avec une utilisation subtile de la lumière naturelle qui donne au film une esthétique presque documentaire.
Mais la véritable force du film, ce sont ses acteurs. Depardieu et Dewaere crèvent l'écran, dégageant une énergie animale fascinante. On sent qu'ils s'amusent comme des fous, improvisant probablement une bonne partie de leurs répliques. L'anecdote selon laquelle ils auraient réellement pris la fuite en voiture après une scène ne m'étonnerait qu'à moitié ! Miou-Miou, alors compagne de Dewaere dans la vraie vie, apporte une fraîcheur et une sensibilité qui contrebalancent parfaitement la testostérone de ses partenaires.
En conclusion, Les valseuses reste un film marquant, qui a gardé une bonne partie de sa puissance subversive. Certes, il y a des aspects datés, des longueurs, et certaines scènes peuvent aujourd'hui faire grincer des dents. Mais l'énergie brute qui s'en dégage, la qualité des dialogues (« On n'est pas bien là ? Paisibles… à la fraîche… décontractés du gland… ») et les performances incandescentes de ses acteurs en font un classique indémodable du cinéma français.
Note : 8 / 10
L'histoire suit Jean-Claude et Pierrot, deux petites frappes de banlieue qui passent leur temps à emmerder le monde et à chercher leur prochain coup. Lors d'une de leurs frasques, ils embarquent Marie-Ange (Miou-Miou), une jeune femme au grand cœur mais frigide. S'ensuit une virée à travers la France, ponctuée de rencontres improbables, de moments de tendresse inattendue et de provocations en tous genres.
Le scénario, adapté du roman éponyme de Blier, ne brille pas par sa complexité. C'est davantage une succession de tableaux qu'une narration linéaire. Mais c'est justement là que réside sa force : dans cette liberté de ton et de structure qui colle parfaitement à l'esprit libertaire du film. Blier ose tout, bousculant les conventions avec un malin plaisir. Il y a certes des longueurs et des scènes qui peuvent sembler gratuites, mais l'ensemble reste étonnamment cohérent dans son incohérence même.
Les personnages sont hauts en couleur et complexes malgré leur apparente simplicité. Jean-Claude et Pierrot sont de véritables sales gosses, tour à tour attachants et détestables. Leur amitié indéfectible est le véritable moteur du film. Marie-Ange, quant à elle, n'est pas qu'un simple objet sexuel : son évolution au fil du récit en fait un personnage à part entière. Les personnages secondaires, comme la touchante Jeanne Moreau, apportent une profondeur inattendue à ce qui aurait pu n'être qu'une comédie potache.
Les valseuses aborde des thèmes qui, s'ils ne sont plus aussi choquants aujourd'hui, restent pertinents : la liberté sexuelle, la révolte contre l'ordre établi, la quête du plaisir comme acte politique. Le film capture parfaitement l'esprit post-68, ce mélange de désillusion et de fureur de vivre. C'est un portrait sans concession d'une jeunesse en roue libre, qui refuse les conventions d'une société qu'elle juge hypocrite.
Techniquement, le film a plutôt bien vieilli. La mise en scène de Blier, sans être révolutionnaire, est efficace et parfois même inspirée. Je pense notamment à cette scène de poursuite filmée en travelling arrière, qui capture toute l'énergie brute des personnages. La photographie de Bruno Nuytten est magnifique, avec une utilisation subtile de la lumière naturelle qui donne au film une esthétique presque documentaire.
Mais la véritable force du film, ce sont ses acteurs. Depardieu et Dewaere crèvent l'écran, dégageant une énergie animale fascinante. On sent qu'ils s'amusent comme des fous, improvisant probablement une bonne partie de leurs répliques. L'anecdote selon laquelle ils auraient réellement pris la fuite en voiture après une scène ne m'étonnerait qu'à moitié ! Miou-Miou, alors compagne de Dewaere dans la vraie vie, apporte une fraîcheur et une sensibilité qui contrebalancent parfaitement la testostérone de ses partenaires.
En conclusion, Les valseuses reste un film marquant, qui a gardé une bonne partie de sa puissance subversive. Certes, il y a des aspects datés, des longueurs, et certaines scènes peuvent aujourd'hui faire grincer des dents. Mais l'énergie brute qui s'en dégage, la qualité des dialogues (« On n'est pas bien là ? Paisibles… à la fraîche… décontractés du gland… ») et les performances incandescentes de ses acteurs en font un classique indémodable du cinéma français.
Note : 8 / 10
Vu le 2 février 2013
Lire la critique sur le site d'Antoine Lepage