Les sept samouraïs
Au fin fond des campagnes japonaises du XVIe siècle, un modeste village paysan doit faire face aux attaques répétées de redoutables bandits de grand chemin. Pillages, viols, meurtres... Les villageois n'ont d'autre choix que d'engager des samouraïs ronins pour assurer leur protection. C'est ainsi que débute l'épanocratique Les Sept Samouraïs, chef-d'œuvre mémorable du grand maître Akira Kurosawa, porté par l'immense Toshirô Mifune dans l'un de ses rôles les plus emblématiques. Le scénario, à la fois profondément ancré dans les traditions nipponnes et suffisamment universel pour toucher au cœur, suit la constitution progressive de cette troupe hétéroclite de guerriers désabusés. De l'orchestration des entraînements à la conception d'ingénieuses stratégies défensives, en passant par les préparatifs logistiques, Kurosawa déploie tout un art de la mise en scène pour insuffler un souffle épique à cette odyssée en apparence modeste. Et malgré quelques inévitables clichés du genre (caractères archétypaux, romantisme prolifique...), le récit ne tombe jamais dans la facilité et conserve un propos humaniste percutant. C'est d'ailleurs là l'une des grandes forces du film : ses personnages travaillés avec soin, campés par des acteurs d'une justesse renversante. Du samouraï bouffon au vieux ronin bourru, en passant par le héros inflexible ou encore le mercenaire cynique, chaque samouraï apporte sa pierre à l'édifice, dévoilant ses failles et ses qualités au fil des épreuves. Des portraits d'une complexité rarement égalée, sublimés par l'impayable composition de Mifune, tour à tour clownesque et fougueuse. Une véritable masterclass d'interprétation. Au-delà du simple divertissement, le long-métrage déploie une réflexion riche sur des thématiques essentielles : l'honneur et le sacrifice, le courage face à l'adversité, la solidarité entre les hommes, la transmission d'un héritage... Des idées magnifiées par une approche contemplative qui contraste avec la violence crue des combats. Kurosawa manie le pinceau comme le sabre, alternant avec brio plans d'une beauté solennelle et scènes d'action d'une sauvagerie révoltante. D'ailleurs, justement, si les combats ne sont pas chorégraphiés de manière millimétrée, leur impact viscéral n'en est que plus saisissant. Loin des conventions aseptisées, ces affrontements rugissants de réalisme dégagent une puissance brute rarement égalée. Une véritable leçon de mise en scène, d'autant plus impressionnante que Kurosawa parvient à conserver une dimension tragique et poétique à ce chaos sanglant. Techniquement, le film est d'une maîtrise éblouissante. La photographie sublime de Asakazu Nakai, qui capte toute la splendeur des paysages comme des gestes les plus infimes, reste gravée dans les mémoires. La direction d'acteurs, déjà évoquée, atteint des sommets. Mention spéciale également à la bande originale signée Fumio Hayasaka, véritable petit bijou qui accompagne à merveille les différentes atmosphères du récit. Au final, Les Sept Samouraïs s'impose comme un monument du cinéma mondial, un chef-d'œuvre d'une maîtrise éblouissante qui a profondément influencé le genre et inspiré des générations de cinéastes. Une fresque grandiose qui conjugue avec brio l'épique et l'intime, la violence et la poésie. Un film essentiel à (re)découvrir d'urgence, tant pour les néophytes que pour les inconditionnels, qui gagnera à être apprécié dans toute sa splendeur. Après ce monument, on ne regarde plus le cinéma de la même manière. Si vous n'avez vu que Ran ou Rashômon, c'est le moment idéal pour compléter votre culture cinéphile !
Note : 7 / 10
Note : 7 / 10
Vu le 4 octobtre 2014