Julien   Lepage

J.  Lepage
The creator
Gareth Edwards (V)
2023

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The creatorAvec The creator, Gareth Edwards, connu pour Rogue one et Godzilla, nous promettait une odyssée de science-fiction ambitieuse, plongeant dans un futur où l’humanité affronte les intelligences artificielles. Le projet, mis en scène avec des moyens limités, mais une vision visuelle saisissante, avait tout pour intriguer. Pourtant, ce film, présenté comme un grand questionnement éthique et technologique, laisse surtout un goût amer, celui d’une œuvre qui s’éparpille et manque cruellement de fond.

L’histoire suit Joshua, un soldat américain (interprété par John David Washington), brisé par la perte de sa femme Maya (Gemma Chan) lors d’un assaut contre des IA en Asie. Cinq ans plus tard, il est recruté pour une mission cruciale : retrouver et détruire une arme révolutionnaire créée par les İA. Mais cette arme se révèle être Alphie, une enfant androïde qui remet en question ses certitudes sur la guerre entre humains et machines. Sur le papier, le pitch avait de quoi captiver, mais le résultat final peine à concrétiser ces promesses.

Visuellement, The creator est irréprochable, voire impressionnant. Les paysages asiatiques, alliés à une esthétique mêlant high-tech futuriste et architecture traditionnelle, offrent des plans splendides. Les décors, filmés en grande partie en Asie du Sud-Est, et les effets spéciaux d’İLM donnent une vraie identité au film. L’idée d’un tournage en décors réels, sans fonds verts ni motion-capture, est audacieuse et apporte une authenticité bienvenue. Mais un beau cadre ne suffit pas à masquer les failles béantes du scénario.

Le principal problème réside dans l’écriture. L’histoire, malgré ses thématiques ambitieuses, manque de profondeur et s’effondre sous le poids des clichés. La relation entre Joshua et Alphie, censée être le cœur émotionnel du film, échoue à toucher, tant elle repose sur des situations convenues et des dialogues simplistes. L’enfant androïde, censée symboliser l’innocence et l’espoir, semble davantage utilisée comme un outil narratif pour forcer l’empathie, sans réelle réflexion sur la conscience ou l’évolution des İA. Ce qui aurait pu être un débat riche sur la coexistence entre humains et machines se résume à une opposition binaire : les méchants Américains contre les gentils robots asiatiques. Une vision manichéenne qui frôle la caricature.

Les personnages souffrent eux aussi d’un traitement superficiel. Joshua, pourtant au centre de l’intrigue, manque de nuances et semble naviguer sans réelle motivation au gré des rebondissements. Les seconds rôles, comme la colonelle Howell (Allison Janney) ou les İA menées par Ken Watanabe, sont à peine esquissés. On ne s’attache à aucun d’entre eux, ce qui rend les enjeux émotionnels pratiquement inexistants.

Sur le plan des thèmes, le film ambitionnait d’explorer les frontières entre humanité et intelligence artificielle, mais cette ambition reste à l’état embryonnaire. Là où des œuvres comme A.İ. de Steven Spielberg ou même Blade runner posaient de vraies questions existentielles, The creator préfère se concentrer sur des scènes d’action spectaculaires et des séquences lacrymales artificielles. L’idée d’un enfant androïde aurait pu être fascinante, mais elle est ici réduite à un prétexte émotionnel sans réelle exploration philosophique.

La réalisation, bien que visuellement impressionnante, souffre d’un rythme mal maîtrisé. Les scènes d’action, nombreuses, manquent de lisibilité et peinent à captiver. Même les moments censés être intenses ou émouvants tombent à plat, souvent plombés par une bande-son envahissante signée Hans Zimmer, qui appuie lourdement sur les violons sans parvenir à compenser le vide narratif.

Quant au casting, il n’aide guère à sauver le film. John David Washington, pourtant prometteur dans d’autres productions, semble ici perdu, naviguant entre des scènes d’action mécaniques et des moments émotionnels forcés. Gemma Chan est sous-exploitée, tandis que Madeleine Yuna Voyles, dans le rôle d’Alphie, fait de son mieux avec un rôle mal écrit. Les acteurs secondaires sont à peine mémorables, coincés dans des archétypes sans relief.

En conclusion, The creator est un film frustrant. Malgré son esthétique soignée et des idées de départ intrigantes, il échoue à proposer une expérience cohérente et immersive. La richesse visuelle est gâchée par un scénario maladroit et des personnages sans âme. Pour un film qui se veut une réflexion sur l’intelligence artificielle et l’humanité, il semble ironiquement avoir été conçu de manière mécanique, comme une recette préformatée pour impressionner sans vraiment toucher. Si vous cherchez une science-fiction qui marie visuel époustouflant et propos intelligent, tournez-vous plutôt vers les classiques du genre, car The creator risque fort de tomber dans l’oubli.

Note : 3 / 10

Vu le 25 décembre 2024

Lire la critique sur le site d'Antoine Lepage


Liste des comédiensJohn David WashingtonMadeleine Yuna VoylesGemma ChanAllison JanneyKen WatanabeSturgill SimpsonAmar Chadha-PatelMarc MenchacaRobbie TannRalph InesonMichael EsperVeronica NgoIan VerdunDaniel Ray RodriguezRad PereiraSyd SkidmoreKaren AldridgeTeerawat MulvilaiLeanna CheaSahatchai ChumrumApiwantana DuenkhaoMariam KhummaungNatthaphong ChaiyawongTawee TeesuraKulsiri ThongrungCharlie McElveenChananticha ChaipaSawanee UtoommaMonthatip SuksophaBrett BartholomewJeb KreagerMackenzie LansingStephen Howard ThomasAgneta Catarina Békassy de BékasBrett ParksPhaithoon WanglomklangRon WeaverMaverick Kang Jr.John Garrett MahlmeisterScott ThomasKandanai ChotikapracalNiko RusakovJames HenryEoin O’BrienDana BlouinAnjana GhogarPongsanart VinsiriMolywon PhantarakChalee SankhavesaPat SkeltonElliot BerkArt YbarraDarina Boonchu
Liste des comédiens de doublageDaria LevannierMario BastelicaLéovanie RaudEve ReinquinJérémie BédruneMartine IrzenskiJoy FeldmanGeneviève DoangLudivine GalieriGilduin TissierGuillaume OrsatVanessa Van-GeneugdenJim RedlerGrégory LerigabNamakan KonéFéodor Atkine