Les 11 commandements
Les 11 commandements, ce film signé par la bande de Michaël Youn, a fait grand bruit lors de sa sortie en 2003. De quoi susciter beaucoup d'attentes chez les amateurs d'humour potache et décalé. Las, le résultat ne fut pas vraiment à la hauteur. Le concept est simple : sous la houlette du "Dieu de la blague" incarné par Dieudonné, Michaël Youn et sa clique se voient confier une mission sacrée, celle d'accomplir 11 "commandements" de la connerie pour ramener la rigolade sur Terre. Des défis pour pousser les limites de l'absurde et du n'importe quoi jusqu'à l'extrême, comme inonder une maison pour en faire une piscine géante ou jouer au beach-volley avec les parties intimes en érection. Le tout évidemment accompli pour de vrai, sans trucages. Sur le papier, le projet a de quoi séduire. Qui n'a pas parfois fantasmé sur l'idée de franchir certaines limites et transgresser les règles pour rire un bon coup ? À cet égard, le film joue la carte de l'anti-conformisme et de la rébellion juvénile à fond. Malheureusement, le scénario manque cruellement d'originalité et d'imagination, accumulant les séquences et les sketchs grossiers sans véritable fil conducteur. On a trop souvent l'impression de revoir les mêmes gags puisés dans un éternel pot commun de la bêtise, sans saveur ni surprise. Quant aux personnages, excepté Michaël Youn qui incarne son rôle d'électron libre potache à merveille, on peine à s'attacher à cette meute de joyeux lurons sans réelle personnalité. Une impression renforcée par un casting fourni mais hétéroclite qui semble là pour faire de la figuration. Les quelques guests stars comme Gad Elmaleh ou Patrick Timsit ne parviennent pas à transcender le tout. Au rayon des thèmes abordés, Les 11 commandements ne se veut être qu'un défouloir puéril qui se gausse des conventions, des institutions et de toute forme d'autorité. Un parti pris que l'on peut certes trouver rafraîchissant à petites doses, mais qui manque de nuances et de profondeur au fil des séquences. On reste sur sa faim, attendant une véritable remise en question des codes qui ne viendra jamais. D'un point de vue purement technique, tout n'est pas à jeter non plus. Bien que le montage décousu donne parfois l'impression de zapper frénétiquement entre différents sketchs, certains plans et cadrages assurent un certain dynamisme visuel bienvenu. La photographie joue également sur le côté artificiel et volontairement kitch à outrance. À défaut d'être une franche réussite artistique, on peut au moins saluer le souci du détail dans la réalisation. Mais le plus gros point noir du film reste sans doute son incapacité à renouveler l'humour aussi potache soit-il. Rares sont les véritables fulgurances comiques qui font mouche. Exit la satire mordante ou le burlesque de bon aloi, on reste trop souvent dans un humour gras et éculé qui ne fait plus beaucoup rire au bout d'un moment. Dommage quand on connaît le talent d'improvisateur hors pair d'un Michaël Youn. Au final, Les 11 commandements laisse une impression mitigée et inégale. Si le parti pris assumé de la grosse farce déjantée peut séduire les amateurs du genre, il fatigue vite par son manque de renouvellement et de justesse. On attendait une charge savoureuse et corrosive, mais on se retrouve trop souvent avec un humour facile et consensuel, malgré toute sa vulgarité revendiquée. Un ratage en demi-teinte qui ne marque pas l'esprit, sinon pour sa nature inclassable entre cinéma et télévision de divertissement. Pour ceux qui voudraient retrouver un humour plus fin et percutant, je conseillerais de se tourner vers les oeuvres de Dieudonné ou d'autres figures de l'humorisation de la société comme Gad Elmaleh.
Note : 3 / 10
Note : 3 / 10
Vu le 1 mars 2014