L'amour et les forêts
L'amour et les forêts de Valérie Donzelli est une plongée glaçante dans les affres d'une relation malsaine, portée par les performances saisissantes de Virginie Efira et Melvil Poupaud. Adapté du roman à succès d'Éric Reinhardt, ce long-métrage très attendu avait suscité de grandes attentes, à la hauteur de son ambitieux projet d'explorer les méandres d'un couple rongé par la toxicité.
Le film dépeint la descente aux enfers de Blanche, interprétée avec une justesse remarquable par Virginie Efira. Au début, tout n'est qu'idylle passionnée avec Grégoire, son nouveau compagnon incarné par un Melvil Poupaud aussi séduisant que troublant. Très vite, les premiers signes inquiétants d'emprise et de manipulation émotionnelle se font jour, plongeant l'héroïne dans un enfer psychologique des plus angoissants. Comme elle l'a confié, Donzelli a été particulièrement marquée par cette scène où Grégoire, d'une perversité glaçante, retourne la situation pour se poser en victime après avoir entendu un portrait d'homme maltraitant à la radio.
Si le scénario emprunte quelques clichés inhérents au genre du thriller psychologique, tels que les coups de fil incessants ou les crises de jalousie dévastatrices, il parvient néanmoins à se démarquer par sa plongée nuancée dans la psyché complexe des deux protagonistes. Blanche n'est pas une simple victime passive, mais une femme aux multiples facettes, tantôt fragile, tantôt d'une force intérieure insoupçonnée. Quant à Grégoire, son personnage fuit la caricature grâce à une écriture subtile qui dévoile progressivement les fissures d'un psychisme torturé. Une évolution peut-être un peu trop brusque et radicale par rapport au téléfilm À la folie, où le mari incarné par Alexis Michalik basculait dans la folie avec une progression plus lente et finalement plus effrayante.
Les thèmes dérangeants des violences conjugales, de l'emprise toxique et de l'isolement sont traités avec une justesse remarquable, sans jamais tomber dans le sensationnalisme facile. Donzelli ne cherche pas à juger mais à comprendre, offrant une plongée glaçante dans l'intimité d'un couple dévoré par une relation malsaine. Une ambition qu'elle parvient à retranscrire avec brio grâce à une réalisation d'une grande maîtrise technique. La photographie soignée de Laurent Tangy, avec qui la cinéaste collaborait pour la première fois, alterne avec habileté entre plans séduisants et cadrages étouffants, reflétant l'évolution émotionnelle des personnages. La bande-son minimaliste renforce avec efficacité l'atmosphère pesante qui se dégage du récit.
Au coeur de cette oeuvre ambitieuse se trouvent deux performances d'acteurs tout simplement remarquables. Virginie Efira, qui avait accepté le rôle avant même l'écriture du scénario, campe une héroïne d'une touchante complexité. Sa présence aimante, conjuguée à son empathie naturelle, rend d'autant plus déchirante sa lente déchéance émotionnelle. Melvil Poupaud, de son côté, impressionne dans ce registre sombre qui lui va si bien. Son incarnation d'un bourreau d'une noirceur fascinante frappe par sa justesse, faisant écho aux grands « salauds de cinéma » à la Jacques Demy ou Claude Chabrol qu'il a pris pour modèles. Leur alchimie trouble porte le film avec une intensité saisissante.
Cependant, si L'amour et les forêts impressionne par ses qualités réalisationnelles et la puissance de son duo d'acteurs, il pèche parfois par un certain académisme dans son propos. Le choix de faire incarner la soeur jumelle de Blanche par Virginie Efira elle-même apparaît ainsi comme un artifice un peu trop artificiel, qui embrouille inutilement le spectateur sans réellement apporter de profondeur à l'intrigue. La comédienne Virginie Ledoyen par exemple, déjà présente au casting dans un petit rôle, aurait pu tout aussi bien endosser ce personnage secondaire pour lui donner plus de consistance.
Dans l'ensemble, ce film d'une redoutable noirceur demeure une oeuvre puissante et maîtrisée, qui plonge le spectateur dans les tourments d'un amour toxique avec un réalisme glaçant. Un rappel nécessaire que la passion, lorsqu'elle dérape, peut se muer en une prison émotionnelle aux murs invisibles mais ô combien étouffants. Si L'amour et les forêts ne réinvente pas totalement la roue, il constitue néanmoins un drame psychologique d'une rare intensité, porté par deux acteurs au sommet de leur art. A défaut d'être un chef-d'oeuvre, ce film vaut assurément le détour pour les amateurs du genre.
Note : 6 / 10
Le film dépeint la descente aux enfers de Blanche, interprétée avec une justesse remarquable par Virginie Efira. Au début, tout n'est qu'idylle passionnée avec Grégoire, son nouveau compagnon incarné par un Melvil Poupaud aussi séduisant que troublant. Très vite, les premiers signes inquiétants d'emprise et de manipulation émotionnelle se font jour, plongeant l'héroïne dans un enfer psychologique des plus angoissants. Comme elle l'a confié, Donzelli a été particulièrement marquée par cette scène où Grégoire, d'une perversité glaçante, retourne la situation pour se poser en victime après avoir entendu un portrait d'homme maltraitant à la radio.
Si le scénario emprunte quelques clichés inhérents au genre du thriller psychologique, tels que les coups de fil incessants ou les crises de jalousie dévastatrices, il parvient néanmoins à se démarquer par sa plongée nuancée dans la psyché complexe des deux protagonistes. Blanche n'est pas une simple victime passive, mais une femme aux multiples facettes, tantôt fragile, tantôt d'une force intérieure insoupçonnée. Quant à Grégoire, son personnage fuit la caricature grâce à une écriture subtile qui dévoile progressivement les fissures d'un psychisme torturé. Une évolution peut-être un peu trop brusque et radicale par rapport au téléfilm À la folie, où le mari incarné par Alexis Michalik basculait dans la folie avec une progression plus lente et finalement plus effrayante.
Les thèmes dérangeants des violences conjugales, de l'emprise toxique et de l'isolement sont traités avec une justesse remarquable, sans jamais tomber dans le sensationnalisme facile. Donzelli ne cherche pas à juger mais à comprendre, offrant une plongée glaçante dans l'intimité d'un couple dévoré par une relation malsaine. Une ambition qu'elle parvient à retranscrire avec brio grâce à une réalisation d'une grande maîtrise technique. La photographie soignée de Laurent Tangy, avec qui la cinéaste collaborait pour la première fois, alterne avec habileté entre plans séduisants et cadrages étouffants, reflétant l'évolution émotionnelle des personnages. La bande-son minimaliste renforce avec efficacité l'atmosphère pesante qui se dégage du récit.
Au coeur de cette oeuvre ambitieuse se trouvent deux performances d'acteurs tout simplement remarquables. Virginie Efira, qui avait accepté le rôle avant même l'écriture du scénario, campe une héroïne d'une touchante complexité. Sa présence aimante, conjuguée à son empathie naturelle, rend d'autant plus déchirante sa lente déchéance émotionnelle. Melvil Poupaud, de son côté, impressionne dans ce registre sombre qui lui va si bien. Son incarnation d'un bourreau d'une noirceur fascinante frappe par sa justesse, faisant écho aux grands « salauds de cinéma » à la Jacques Demy ou Claude Chabrol qu'il a pris pour modèles. Leur alchimie trouble porte le film avec une intensité saisissante.
Cependant, si L'amour et les forêts impressionne par ses qualités réalisationnelles et la puissance de son duo d'acteurs, il pèche parfois par un certain académisme dans son propos. Le choix de faire incarner la soeur jumelle de Blanche par Virginie Efira elle-même apparaît ainsi comme un artifice un peu trop artificiel, qui embrouille inutilement le spectateur sans réellement apporter de profondeur à l'intrigue. La comédienne Virginie Ledoyen par exemple, déjà présente au casting dans un petit rôle, aurait pu tout aussi bien endosser ce personnage secondaire pour lui donner plus de consistance.
Dans l'ensemble, ce film d'une redoutable noirceur demeure une oeuvre puissante et maîtrisée, qui plonge le spectateur dans les tourments d'un amour toxique avec un réalisme glaçant. Un rappel nécessaire que la passion, lorsqu'elle dérape, peut se muer en une prison émotionnelle aux murs invisibles mais ô combien étouffants. Si L'amour et les forêts ne réinvente pas totalement la roue, il constitue néanmoins un drame psychologique d'une rare intensité, porté par deux acteurs au sommet de leur art. A défaut d'être un chef-d'oeuvre, ce film vaut assurément le détour pour les amateurs du genre.
Note : 6 / 10
Vu le 18 avril 2024