Le duo de showrunners David Benioff et D. B. Weiss avait de quoi susciter l'engouement avec l'adaptation de la trilogie à succès de l'auteur chinois Liu Cixin, Le problème à 3 corps. Après le sommet que fut Game of thrones pendant plusieurs saisons, on attendait beaucoup de cette ambitieuse série de science-fiction rassemblant les têtes d'affiche Jovan Adepo, Liam Cunningham, Benedict Wong et Eiza González.

La première partie plonge directement les spectateurs dans un mystère insondable, confrontés à des phénomènes paranormaux qui défient la logique et la raison. Un groupe de brillants scientifiques, dont l'interprète principale Jess Hong se démarque, est le témoin privilégié d'événements remettant en cause les lois fondamentales de la physique. L'intrigue démarre sur les chapeaux de roues, installant un climat d'angoisse écrasant renforcé par la mise en scène millimétrée. Une aura de mystère aussi fascinante que dérangeante émane de chaque plan.

Parmi les éléments les plus marquants, on retiendra évidemment les séquences mettant en scène un mystérieux jeu vidéo immersif aux allures de simulations ultraréaliste. Un concept déroutant porté par des effets spéciaux bluffants et une réalisation aux petits oignons. Le budget de production fut en effet conséquent, dépassant les 200 millions de dollars selon certaines rumeurs, un investissement à la hauteur des ambitions démesurées du projet.

Malheureusement, cette première partie souffre d'un certain manque de cohérence dans le développement de son intrigue. Trop mystérieuse, celle-ci peine à nous accrocher durablement malgré son indéniable pouvoir d'attraction initial. Un problème de rythme qui se poursuit dans la portion suivante, où l'histoire marque un peu trop le pas avant d'entrer enfin dans le vif du sujet.

C'est dans cette seconde partie que Le problème à 3 corps retrouve un peu de son souffle. On y découvre que l'humanité pourrait bien faire face à une menace extraterrestre sans précédent, forçant les protagonistes à s'unir pour élaborer un plan de défense à très long terme. Un concept ambitieux qui aurait mérité d'être introduit plus tôt pour éviter cette longue période de flottement au milieu de la saison.

Si le scénario n'innove pas des masses, reprenant de nombreux clichés du genre, il faut reconnaître qu'il est plutôt malin et bien ficelé dans l'ensemble. Les adeptes de SF ne seront pas dépaysés, mais l'exécution permet d'apprécier le voyage malgré quelques longueurs. Un petit bémol cependant sur le traitement parfois trop appuyé des thématiques philosophiques autour de la condition humaine face à l'immensité de l'univers.

Au rayon des points forts, la réalisation se montre particulièrement soignée, soutenue par une photographie léchée et une ambiance sonore oppressante signée Ramin Djawadi, le compositeur de la BO de Westworld. Une direction artistique ambitieuse qui ne manque pas de marquer les esprits, à l'image de ces plans de la base chinoise aux confins du désert de Gobi dont le tournage fut éprouvant.

Le jeu des acteurs fait malheureusement un peu désordre. Si les vétérans Benedict Wong, John Bradley (Game of thrones) et Jonathan Pryce (phénoménal dans ses apparitions) assurent le service minimum, la plupart des jeunes recrues peinent à convaincre dans leurs rôles de génies incompris. Un problème récurrent pour la série qui semble parfois perdre de vue la nature véritablement exceptionnelle que sont censés avoir ces brillants esprits.

Au final, Le problème à 3 corps est une série qui a un certain potentiel, mais qui ne parvient pas franchement à le concrétiser dans cette première salve d'épisodes. Malgré des débuts intrigants et une réalisation ambitieuse, le rythme parfois poussif et l'inégalité de la distribution laissent un sentiment de frustration après ce prologue prometteur. Une déception à nuancer car la série réussit malgré tout à nous happer dans ses mystères dès les premiers instants. Les amateurs de science-fiction audacieuse trouveront matière à se régaler, à condition d'être patients et indulgents face aux quelques défauts de jeunesse. En espérant que la suite, déjà en préparation, profite des leçons de ce début mi-figue mi-raisin pour nous offrir une expérience plus accomplie. En attendant, n'hésitez pas à (re)découvrir l'excellent manga Gantz qui rappelle étrangement la série, avec une première partie nimbée de mystères, avec assez peu de réponses, et une seconde partie qui nous montre une humanité se préparant à une invasion extraterrestre. Coïncidence ? Peut-être.

Note : 6 / 10