La fille du puisatier

La fille du puisatier
Daniel Auteuil
2011

Après plus de trente ans d’une carrière cinématographique riche en tant qu’acteur, Daniel Auteuil passe derrière la caméra et revient, pour l’occasion, à ses amours passées : la Provence de sa jeunesse avignonnaise ; et plus particulièrement la Provence de Marcel Pagnol.
Fanatique de l’auteur-réalisateur, Daniel Auteuil n’hésite pas à remettre au goût du jour l’œuvre de son maître en tournant une nouvelle version de La fille du puisatier.
L’histoire est celle, classique et chère à Victor Hugo, du ver de terre amoureux d’une étoile. Ici, le ver est la fameuse fille du puisatier (Àstrid Bergès-Frisbey) et l’étoile est un pilote, fils de marchand aisé (Nicolas Duvauchelle). Alors que tout aurait pu se passer au mieux, un drame survient : d’une part, le ver tombe enceinte dans un monde ou un enfant né hors mariage est un bâtard ; et d’autre part, l’étoile s’éteint, tombée derrière les lignes ennemies au tout début de la seconde guerre mondiale.
Évidemment, le conflit éclate en ce microcosme :  Daniel Auteuil, le père de sa fille, renie celle-ci ainsi que son engeance tandis que d’autre part, Jean-Pierre Darroussin et Sabine Azéma, les parents de feu l’aviateur, refusent catégoriquement de reconnaître l’enfant, évitant au passage de débourser pour un petit-fils d’immigré italien.
Au passage, Kad Merad, ami et collègue du puisatier, en profite pour demander la main de la future mère célibataire, évitant ainsi à la famille le déshonneur et assouvissant par là-même quelque fantasme. Las, la jeune fille se trouvant belle et ayant connu l’Amour rejette le pauvre hère.

De tout ceci, le bilan est plutôt positif, car force est de reconnaître en Daniel Auteuil une bonne graine de réalisateur. D’aucuns reprocherons à certains membres de l’équipe un accent un tantinet forcé, mais c’est être tatillon.
Globalement, les acteurs sont plutôt convaincants, même si – à propos de l’accent – il est difficile de comprendre pourquoi certains personnages ne l’arborent pas, mais qu’importe ! L’ensemble est somme toute parfaitement honnête et l’important est là : on croit à cette histoire, vivant au fur des rebondissements, les angoisses, les peines et les joies des protagonistes.
Tout juste peut-on regretter le choix d’Àstrid Bergès-Frisbey pour camper l’héroïne, car pas très convaincante…
Un joli film, donc, qui augure de bonnes choses pour la carrière de Daniel Auteuil qui envisage déjà de poursuivre son œuvre d’actualisation des films de Pagnol avec dans sa besace la « trilogie marseillaise » : Marius, Fanny et César.

Verdict : 

Ma part du gâteau

Ma part du gâteau
Cédric Klapisch
2011

Étant assez fan de Klapisch, la sortie d’un de ses films est un événement à ne pas rater.
Ma part du gâteau ne déçoit pas. Gilles Lellouche et Karin Viard, à leur habitude, sont excellents, et même si le fond du sujet est un peu léger, cette légèreté est traitée avec talent.
Il s’agit là d’un film sympathique, parfaitement distrayant malgré quelques longueurs ça et là.

Verdict :

Black swan

Black swan
Darren Aronofsky
2010

Présenté pour la première fois en 1877, Le lac des cygnes est un ballet composé par Tchaïkovski qui met en scène un prince qui tombe amoureux d’un cygne blanc métamorphosé en femme. Celui-ci décide de l’épouser mais se marie sans le savoir au cygne noir ; jumeau maléfique de celle qu’il aime.

Dans ce film, Darren Aronofsky nous conte l’histoire de Natalie Portman, danseuse émérite, qui convoite le première rôle de cette pièce mise en scène par Vincent Cassel. L’hiérosolymitaine approchant de la trentaine, ce rôle pourrait bien être le point final d’une carrière pas si brillante. En clair, c’est son dernier espoir de ne pas finir comme sa mère, ancienne danseuse, qui vit cloîtrée chez elle, repliée sur elle même, se reprochant sans cesse d’avoir raté sa carrière.

Lors des auditions, la jeune fille laisse au chorégraphe une impression mitigée : sa technique parfaite fait de son cygne blanc un modèle, mais handicape son cygne noir, censé être plus bestial. Elle va alors devoir travailler sans relâche pour réveiller l’animal qui est en elle.

D’une réalisation impeccable, Black swan nous entraîne dans les méandres malsains de la schizophrénie qui conduit inéluctablement à la folie pure. Angoissant, sombre, dérangeant – parfois choquant -, le film nous conduit au plus profond de l’anxiété humaine à un rythme effréné.
Alors que Vincent CasselBarbara Hershey et Mila Kunis sont excellents, Natalie Portman est tout simplement magistrale.

Après avoir peint un tableau noir du milieu du catch avec The wrestler, le réalisateur force encore sur le noir avec le monde de la danse. Le résultat est malsain et spectaculaire.

Verdict : 

Au-delà

Au-delà
Clint Eastwood
2011

Chaque sortie d’un nouveau film de Clint Eastwood est un événement. Au-delà ne déroge pas à la règle.
Comme son titre l’indique, le réalisateur nous parlera ici de la mort. Celle-ci touchera chacun des trois protagonistes du film d’une manière très différente. Cécile de France, journaliste française, vivra une expérience de mort imminente troublante. Matt Damon possède le don de communiquer avec les morts. Enfin, le jeune Frankie McLarenGeorge McLaren perdra son frère jumeau dans un accident de la route.
Alors que la journaliste et le petit garçon chercheront des réponses, le médium, lui, évitera les questions.

Très joli sur le plan esthétique, comme toujours avec Clint Eastwood, le film pêche par une fin assez convenue et par un manque global de suspens. Heureusement, les acteurs tous excellents feront qu’il sera difficile malgré ses défauts de ne pas aimer ce film ; d’autant plus qu’il compte quelques jolies scènes, en particulier celle du tsunami et celle pendant le cours de cuisine italienne avec Bryce Dallas Howard.

Au-delà n’est donc clairement pas le meilleur film du réalisateur, mais il n’empêche qu’il s’agit là d’une œuvre assez jolie et bien faite.

Verdict : 

Le fils à Jo

Le fils à Jo
Philippe Guillard
2010

Le rugby avait déjà été mis à l’honneur sur grand-écran avec la sortie d’Invictus un an plus tôt. Le sport était alors traité à son plus haut niveau : une finale de coupe du monde. Ici, pas de spectateurs par milliers, pas de fans déchaînés, pas d’enjeu politique. Dans le film, Doumiac est un petit village du sud-ouest où le ballon ovale est le centre de toutes les attentions ; particulièrement au sein de la famille Cannavaro où l’on est jouer professionnel de père en fils.
Un père (Gérard Lanvin), ancien champion, voudrait justement voir son fils (Jérémie Duvall) suivre ses traces… mais le jeune garçon, pourtant amateur de rugby, ne parvient pas à gérer la pression que lui fait subir son père et décide d’arrêter la pratique de ce sport.

Très simple scénaristiquement, le film va pourtant plus loin que ça. Il s’agit en réalité de tranches de vies, animées avec talent par une troupe d’acteurs aussi habiles que naturels. Olivier Marchal et Vincent Moscato vivent réellement leurs rôles du Chinois et de Pompon, amis d’enfance du père désabusé.
Pas passionnant narrativement, donc, Le fils à Jo reste le témoignage de gens simples au grand cœur ; une vraie famille sportive. Bref, un film « détente ».

Verdict : 

Une petite zone de turbulences

Une petite zone de turbulences
Alfred Lot
2009

Après Gérard Depardieu dans Mammuth, c’est au tour de Michel Blanc de subir les affres de la retraite. Alors que dans le premier film, le « jeune » retraité quitte son univers familial, dans celui-ci, le protagoniste s’y retrouve plongé contre son gré.
Hypocondriaque, le père de famille se découvre une tâche dermique sur la hanche : c’est forcément un cancer ; quoi qu’en dise le médecin. Pire : en plus de se savoir condamné, Michel Blanc doit désormais supporter sa famille à temps plein. Difficile de côtoyer sa fille (Mélanie Doutey) qui va épouser un débile (Gilles Lellouche), son fils (Cyril Descours) homosexuel et sa femme (Miou-Miou) qui le trompe avec son meilleur ami !

Tout va mal pour lui, donc, et évidemment, tout fini bien dans ce film sans grande imagination. Les scènes longues et ternes se suivent et se ressemblent… Heureusement que les acteurs sont bons !
Au final, donc, cette zone de turbulences se traverse lentement mais sûrement… Peu d’intérêt pour ce film qui aurait pu être un bon téléfilm.

Verdict :

La petite Chartreuse

La petite Chartreuse
Jean-Pierre Denis
2004

Réalisateur d’Art et d’essai, comme il se qualifie lui-même, Jean-Pierre Denis adapte ici un roman de Pierre Péju qui compte l’histoire d’un libraire (Olivier Gourmet) ancien alcoolique qui, après la départ de sa femme, a trouvé refuge auprès de ses livres et auprès de sa montagne, la Chartreuse. Grenoblois, il s’y rend régulièrement en camionnette. Sa vie est une routine solitaire bien réglée jusqu’au jour où son véhicule frappe une fillette (Bertille Noël-Bruneau) qui traversait la route en courant.
Gravement blessée, la jeune fille est également fortement traumatisée et ne prononce plus le moindre mot. Sa mère (Marie-Josée Croze), atterrée, n’ose même plus lui rendre visite. Jean-Pierre Denis comprend que la mission de s’occuper de cette petite fille lui incombe. Il l’emmènera alors en thérapie dans sa montagne.

Malgré un scénario assez convenu, les acteurs auraient été assez bons pour convaincre, voire pour émouvoir, si le rythme n’avait été aussi lent. Faisant s’éterniser chaque plan, le réalisateur montre bien la solitude et la dimension temporelle du calvaire que vivent les trois protagonistes, n’hésitant pas à faire partager ce calvaire avec le spectateur.
Évidemment, le film est conforme aux attentes de Jean-Pierre Denis puisque cet ennui mélancolique était l’objet même de l’œuvre ; d’ailleurs, il explique lui-même que le titre du film, La petite Chartreuse, outre la montagne, fait référence aux moines et à leur silence.
La pari est réussi, mais à quel prix ?

Verdict :

Fragments

Fragments
Rowan Woods
2007

Dans Magnolia, Paul Thomas Anderson narrait le destin d’un groupe d’individus sans liens qui allaient d’unir dans un événement final. Fragments est exactement l’inverse puisque l’événement se produit au début du film.
Un matin, dans un café, un homme entre, un revolver à la main et tire, au hasard, sur plusieurs personnes avant de se donner la mort.

Servi par un casting quatre étoiles, le film avait de quoi faire rêver : en effet, on retrouve à l’affiche Forest Whitaker, Guy Pearce (Memento), Kate Beckinsale, Jeanne Tripplehorn, Embeth Davidtz (L’homme bicentenaire) ou les jeunes Josh Hutcherson (Le secret de Terabithia) et Dakota Fanning (La guerre des mondes).

Malheureusement, si ce film est sorti en DVD quatre jours après sa diffusion au cinéma, ce n’est pas par hasard. Les acteurs étant dans l’ensemble plutôt bons, il n’y a rien à leur reprocher. Le vrai problème vient d’un scénario plat, inintéressant et surtout sans conclusion.
Tout au long du film, on cherche à comprendre où compte nous emmener Rowan Woods. La conclusion est là : nulle part.
On ne pourra que regretter le fait que le réalisateur n’ai pas passé plus de temps sur le scénario. En attendant, les spectateurs resterons sur leur faim.

Verdict :

Quartier lointain

Quartier lointain
Sam Garbarski
2010

Adapté du joli manga de Jirō Taniguchi, Quartier lointain conte l’histoire d’un homme d’une cinquantaine d’années (Pascal Greggory) qui, par mégarde, se trompe de train et se retrouve malgré lui dans la ville de son enfance, dans laquelle il n’était jamais retourné. Profitant de l’important temps d’attente avant le prochain train, il se rend au cimetière, sur la tombe de sa mère, morte d’une dépression après le départ mystérieux et imprévisible de son père.
Pris d’un vertige alors qu’il observait un papillon voler, l’homme s’effondre. À son réveil, l’invraissemblable se produit : il a retrouvé ses quatorze ans ! Ainsi métamorphosé (et interprété, du coup, par Léo Legrand), l’homme se précipite en ville où il constate, médusé, que celle-ci a recouvré son aspect des années 70. Chez lui, il revoit même ses parents !
Très vite, il se rendra compte qu’il est revenu quelques semaines avant la disparition de son père (Jonathan Zaccaï).

Avant-première du film

Pour qui n’a pas lu le manga, ce film est sympathique et se laisse plutôt bien regarder malgré un amateurisme latent et une interprétation approximative.
Pour qui a lu le manga en revanche, le bilan est moins neutre. Certes, la transposition de l’action de Tottori-shi à Nantua est concluante. Certes, la musique de Air colle parfaitement à l’ambiance. Cependant, le scénario, bien que globalement fidèle à l’œuvre originale, devient ici d’une lourdeur affligeante et se retrouve amputé de quelques scènes parmi les meilleures que compte le manga. Pire : le réalisateur, Sam Garbarski, n’hésite pas à ajouter à ce conte poétique une scène assez graveleuse avec l’ami d’enfance du héros.
Enfin, c’est surtout la conclusion de l’œuvre qui pose réellement problème. Alors que la bande-dessinée choisit de s’achever sur une fin émouvante ancrant l’aventure dans la réalité, le film s’arrête sur du flou ; mais un flou totalement injustifié et inconsistant. Bref, le film est passé à côté de l’essence même de ce qu’avait voulu Jirō Taniguchi. Dommage.

Verdict :

Mystic river

Mystic river
Clint Eastwood
2002

Trois enfants jouent tranquillement dans une ruelle quand des policiers débarquent en voiture pour chercher l’un deux et le ramener chez lui. Mais la voiture ne prend pas la route de son domicile : les policiers sont en réalité des ravisseurs qui kidnappent l’enfant et abusent de lui jusqu’à ce qu’il parvienne à s’enfuir.
Quelques années plus tard, ce jeune garçon est un père de famille interprété par Tim Robbins, marié à  Marcia Gay Harden. Il a depuis complètement perdu contact avec ses anciens camarades qu’il salue toutefois de loin lorsqu’il les croise dans les rues de ce petit quartier de Boston. Pourtant, un drame terrible va réunir à nouveau Tim Robbins, Kevin Bacon et Sean Penn : la fille encore adolescente de se dernier vient d’être retrouvée sauvagement assassinée.
C’est Kevin Bacon, devenu policier, qui est chargé de l’enquête tandis que Sean Penn en père effondré qu’il est va tenter de retrouver le meurtrier à l’aide de sa propre équipe de gros bras, employant des méthodes plus radicales que celles de la police.

Le scénario, de base particulièrement fort (il s’agit de l’adptation d’un roman de Dennis Lehane), est sublimé par le talent de réalisateur de Clint Eastwood. Sombre et prenant, le film entraîne le spectateur au cœur de la psychologie humaine en dévoilant trois facettes portées par chacun des trois protagonistes, d’ailleurs tous trois excellents dans leurs rôles.

Bref, comme souvent, Clint Eastwood nous livre un très beau film, particulièrement bien fait.
À voir !

Verdict :